Rencontre avec Emilia Ilke

L’artiste suédoise nous emmène dans son studio à Stockholm, où ses souvenirs d’enfance nourrissent sa créativité. Entre deux coups de ciseaux pour ses collages, Emilia Ilke développe un art à part entière, à base de couleurs douces et de naïveté.

Emilia a posé ses pinceaux et papiers à découper dans le quartier de Liljeholmen à Stockholm. “Mon atelier est un véritable lieu de bonheur pour moi. C’est une petite pièce tranquille avec une grande fenêtre et un haut plafond, d’environ 4 mètres. Il est situé dans une maison datant de 1916. C’était le bureau principal de l’un des plus grands producteurs de peinture suédois.” Un lieu qui semblait prédestiné à l’accueillir, elle et ses tubes de couleurs. 

Son métier d’artiste n’a rien d’un hasard non plus, même s’il s’apparente à un fil rouge parfois caché et qu’il a fallu détricoter dans le labyrinthe de sa vie. Emilia a grandi dans un foyer suédois-polonais, entouré de ses quatre frères et soeurs où chacun exprimait un tempérament créatif. “Nous jouions tous d’un instrument et avions comme un petit orchestre à la maison. Je ne me suis jamais sentie passionnée par le fait de jouer, j’ai donc été heureuse de trouver le dessin à l’adolescence. J’avais enfin l’impression de me trouver.” L’artiste confie travailler dur depuis ses 15 ans et sa toute première exposition. Son déménagement à Stockholm en 2014 marque un virage dans son parcours. “A mon arrivée dans cette nouvelle ville, j’ai commencé à étudier l’art pendant deux ans. Depuis, je travaille comme artiste à temps plein. Je suis tellement reconnaissante que ça marche ! ”

En observant son studio, on remarque que la petite pièce aux grands murs est peuplée de ces œuvres. La plupart sont des travaux en cours, qui attendent patiemment leur tour. “J’ai développé une méthode qui fonctionne très bien pour moi. En général, je travaille sur plusieurs tableaux en même temps. Je ne fais presque jamais de croquis, j’ai tout dans ma tête.” L’artiste travaille à l’instinct. Elle laisse courir ces ciseaux dans des papiers qu’elle peint afin de créer des formes qui ressemblent à des céramiques, des animaux ou des coquillages. Elle assemble, déconstruit, ajoute et supprime des pièces à ses collages. 

Elle raconte s’inspirer des dessins de ses enfants ou des photos de son enfance pour ses tableaux. L’enfance… Une ritournelle qu’on retrouve dans le fond et la forme de ses créations, à la fois naïve et ludique. Quand on lui demande ses influences, Emilia cite de nombreuses artistes suédoises des années 50 et 60, telles que Marie-Louise Ekman, Marianne Lindberg de Geer, Lena Cronqvist, Mamma Andersson, Helene Billgren et bien d’autres…D’autres influences pour son travail.  Aujourd’hui, Emilia continue à piocher dans le fil de ses jeunes années et de la musique. “En ce moment, j’aime peindre les mains, surtout en combinaison avec le piano. J’aime écouter du piano dans mon atelier quand je peins. J’ai beaucoup de souvenirs de mes leçons quand j’étais enfant. J’avais tellement peur de mon professeur.” Ces dernières œuvres nous permettent de nous glisser dans sa peau. On observe son point de vue lors des répétitions, avec des mains majestueuses posées sur un clavier aux touches noires et blanches ou blanches et rouges… 

Emilia prépare aussi ses prochains projets dont un déménagement “Dans quelques semaines, j’aurai une nouvelle pièce qui sera presque deux fois plus grande. J’ai vraiment hâte d’y emménager. J’ai la tête qui tourne avec tous les plans d’intérieur que je veux réaliser.” Un nouveau fil à détricoter pour Emilia et un nouveau rendez-vous pris pour une prochaine visite.

Texte : Sophie Carré ; Photos : @mirawickman ; Styling : @jstridh & @sofiahjelmstylist


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